Rapport d'Amnesty International : l'année 2022, "un tournant pour les droits humains" • FRANCE 24
Nous sommes en direct avec Agnès Calamar, que vous avez aperçu dans le reportage. Bonjour, secrétaire général d'Amnesty International. Merci d'accepter de commenter ce rapport à Cablan, à nos côtés. Cette phrase, qui est reprise en tit par plusieurs de nos confrères aujourd'hui, l'année 2022, est un tournant pour les droits humains. Mais en pire, c'est un constat à Cablan. Chaque année, les conclusions sont terribles, mais cette fois, on a le sentiment qu'on a passé un cran supplémentaire. Écoutez, depuis bien sûr une dizaine d'années, malheureusement, Amnesty International se doit de lancer des cris d'alarme sur la détérioration progressive de l'environnement pour la protection des droits humains, que ce soit au niveau de la liberté d'expression, les droits économiques sociaux, ou la liberté de manifester.
En 2022, oui, il y a eu de nouveau ce phénomène de violation accrue, mais il y a quand même quelque chose de positif que nous avons bien mis en avance. C'est ce qui s'est passé avec la réponse internationale en Ukraine. En effet, elles démontrent les doubles standards, les deux poids de mesure, mais pour nous, elle est aussi un modèle. Maintenant, nous avons un modèle sur la façon dont la communauté internationale devrait répondre aux crises. Ça faisait bien des décennies que nous n'avions pas eu une telle réponse qui a mis l'état de droit international et la protection des droits humains en son cœur. Donc ça, c'est quand même l'aspect positif de 2022, un modèle que nous n'avions pas avant. Et en même temps, les Occidentaux, que vous épinglez sévèrement, puisque vous dites que l'invasion de l'Ukraine a dévoilé l'hypocrisie d'états occidentaux qui, à côté de ça, ont réussi à fermer les yeux de graves violations commises ailleurs.
Exactement. C'est-à-dire que c'est un modèle que nous, nous voudrions voir répéter pour d'autres crises. En 2022, ça ne s'est absolument pas passé. On ne l'a pas vu répéter pour la protection des Palestiniens contre l'origine d'apartait dans l'Israël. On ne l'a pas vu répéter dans les prises de position pour l'Ethiopie. Et on ne l'a certainement pas vu dans le traitement des réfugiés où là, les deux poids de mesure sont extrêmement probants. On accueille à bras ouverts comme on le devait, comme on le devait, les réfugiés ukrainiens, des millions d'entre eux.
Et on refuse le même traitement à des individus, des gens, des femmes, des hommes qui fuyaient les conflits et la répression en Afghanistan, en Syrie, en Irak, ou d'ailleurs en Éthiopie ou en Éritre. Donc le traitement des réfugiés, c'est vraiment ici que l'on voit ces doubles standards. Ce n'est pas d'ailleurs qu'en Europe, aux États-Unis. Le gouvernement américain a accueilli les réfugiés ukrainien comme, de nouveau je le répète, il devait le faire, mais en même temps, il a renvoyé chez eux plus de 25 000 personnes venues de Haïti. Elles aussi qui fuyaient des répressions et une violence extrêmement destructive. L'année 2023, qui sera celle d'un anniversaire, 75e anniversaire de la déclaration anniversaire des droits de l'homme et de la seconde guerre mondiale. Pour vous, cette année doit marquer un tournant en matière de protection des droits humains ? – Absolument.
La déclaration universelle, c'est le résultat, le produit de ce que l'on peut faire de pire. C'est le produit de l'holocauste, c'est le produit de 6 millions de morts et au-delà des morts liés à la 2e guerre mondiale. – Peut-on imaginer un nouvel ordre mondial fondé sur la protection des droits sans avoir cet holocaust et cet abyss ? Nous, c'est ce que nous demandons aux leaders internationaux. S'il vous plaît, soyez proches de la génération de 1948, ne répétez pas ce que la génération de 1930 a fait. Pour cela, il faut vraiment adopter de façon cohérente, systématique, ces valeurs et les mettre en oeuvre partout et pour tout le monde. C'est ça, je crois, la leçon de ce 75e anniversaire. – Vous dites d'ailleurs, Agnès, qu'à la mars sans attendre l'engraissement général, on est bien placé ici à France 24, on relate chaque jour de crise qui ont lieu un peu partout dans le monde.
Aujourd'hui, nous sommes en train de commenter ce qui se passe ici en France, cette bésième journée d'action, une mobilisation contre la réforme des retraites. Il y a quand même une tendance qui est générale. – Absolument. La liberté de manifester l'espace civique en règle générale se restreint à travers le monde et cela comprend les pays démocratiques comme la France. C'est un phénomène global qui est lié d'ailleurs comme votre reportage l'a fait remarquer à la dégringolade du niveau de vie à travers le monde. – Elle-même le produit du changement climatique de l'agression russe contre le peuple ukrainien, cette dégringolade du niveau de vie s'est traduit dans d'autres régions par l'insécurité alimentaire et par la famille. Les gens en ont marre, les Français en ont marre, les Mexicains en ont marre, les Colombiens en ont marre, les Chadiens en ont marre et ils vont dans la rue.
Les Iraniens en ont marre, les Afghans en ont marre. C'est soit en raison de la situation économique qui se détériore à travers le monde, soit en raison de la répression des gouvernements, parfois lié d'ailleurs à cette situation économique. Il y a un mouvement généralisé à travers le monde d'actions collectives auxquelles les gouvernements répondent par la répression. Cela ne l'arrête pas l'action collective. Au contraire. – Merci beaucoup, Agnès Calamard. Merci pour votre témoignage.
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