Rebecca Marder : "François Ozon insuffle un vent de MeToo et parle de sujets diablement d'actualité"
7h48, deux actrices sont avec nous ce matin dans ce studio pour parler d'un film, Mon Crime dont elle partage l'affiche Nadia Théréskiewicz et Rebecca Marder. Bonjour à toutes les deux. Bonjour. Merci d'être avec nous ce matin, Mon Crime donc de François Auzon en salle, mercredi prochain, mercredi 8 mars, c'est un film qui raconte l'histoire de deux jeunes amis, l'une est actrice, l'autre est avocate et elle peine à faire décoller leur carrière. Ce n'est pas du tout votre cas dans la vie puisque vous crevez l'écran depuis quelques mois, Nadia vous avez reçu vendredi le César de meilleur espoir féminin pour votre rôle dans le film Les Amandiers. Rebecca vous tournez beaucoup également, vous avez vu l'an dernier à l'affiche notamment dans Simone le Voyage du siècle qui a très bien marché. Est-ce que vous vous connaissiez avant le tournage de Mon Crime toutes les deux? Non, on ne se connaissait pas.
Enfin moi je l'avais vu jouer dans Seule les Bêtes de Dominique Molle et puis on s'est rencontré pour le casting pour l'audition. Nadia? Moi aussi je l'ai connaissée depuis que j'ai 10 ans parce que j'ai vu Rebecca dans son premier film quand elle avait 10 ans et du coup moi aussi. Mais après c'est vrai qu'on s'est rencontré pendant le casting et ça a tout de suite matché. Vous ne vous connaissiez pas et là vous ne vous quittez plus. Oui exactement. Comment ça se passe la rencontre et le travail peut-être même avant le tournage vous jouez deux amis vous êtes très proches dans le film pour que cette sororité, cette solidarité entre femmes, cette amitié elle éclate à l'écran. Est-ce que vous avez passé du temps ensemble avant? Est-ce que François Ozon vous a demandé ça? Vous avez réservé des moments pour ça? Oui on a fait beaucoup de lectures et puis comme rarement sur un tournage on a eu le flux là de répéter en amont du tournage ce qui arrive rarement au théâtre oui mais au cinéma peu et donc là on a répété pendant deux semaines dans les décors en studio avant le tournage donc ça a tout de suite ça nous a lié.
Oui puis on a passé du temps ensemble chez Lévoire Grivée qu'à au théâtre c'était sa dernière à la comédie française et puis après comme ça marche dans la vie c'est toujours plus simple qu'on est aussi amis dans la vie. C'est pas banal de partager la fiche d'un film à deux en quoi est-ce particulier est-ce qu'il faut veiller à la place de l'autre en permanence? Mais de toute façon sur n'importe quel projet on fait attention à ses partenaires j'ai l'impression que je sois au théâtre ou au cinéma ou dans un film mais c'est vrai que de jouer un duo et d'autant plus un duo aussi complémentaire parce que dans ce film ça parle vraiment de ça. C'est deux jeunes femmes visionnaires qui sont toutes les deux très malicieuses et qui ont besoin l'une de l'autre aussi pour réussir et la fin justifie les moyens. Nadia ça existe la sororité au cinéma vous retrouvez fatalement concurrence parfois pour des rôles vous êtes exactement de la même génération vous avez 26 et 27 ans toutes les deux? Ah mais je pense que non non mais là c'est je pense que là c'est un film sur la sororité qui met en valeur l'amitié féminine et évidemment que j'y crois et je pense qu'on est toutes les deux on est très différentes et en même temps on a une connexion là dans le film en l'occurrence mais pour en termes de concurrence je dirais pas ça c'est voilà on fait partie fâche et fière de faire partie d'une génération de comédienne que j'admire et avec qui j'aime travailler et avec qui je m'entends dans le travail dans la vie. Alors Nadia vous jouez donc dans ce film une actrice, Rebeca vous êtes une avocate vous êtes sans le sous, vos carrières je les dis piétine et lorsque votre personnage Nadia se retrouve accusé d'un meurtre qu'elle n'a pas commis celui d'un riche producteur de cinéma et bien vous décidez toutes les deux de faire de ce procès à la fois un tremplin pour vos carrières pour vous faire connaître mais aussi une tribune pour défendre le droit des femmes ce qui va parfaitement fonctionner et donc vous décidez de vous accuser Nadia dans ce de ce crime ça se passe dans cette scène du film dont on écoute un extrait. Je vous. Bah vous avez quoi? Mon crime c'est moi qui es tu mon ferron, pas c'est moi les menottes.
Mais attendez attendez mais vous êtes sûr? Certaines je l'ai tué avec son révolver que j'ai ramené chez moi que j'accueille Non attendez maître molléon vous confirmez? Je confirme les avis de ma cliente. Trappu qu'est-ce que vous dites de ça? C'est des citations monsieur le juge. Ma chère petite vous avouez je suis le plus heureux des hommes. Moi aussi enfin des femmes on va me conduire en prison? Je suis désolé mais c'est inévitable. Ne vous excusez pas de pour prêter à nous exploser d'un jour à l'autre. Oh bah alors je vous rend plutôt service. Plutôt.
Les délicieux. Voilà l'accusé qui rend service au je-que-je d'instruction incarné par Fabrice Lucchini. On a reconnu Olivier Broche dans le rôle du gréfié. Comment s'est passé le tournage avec Fabrice Lucchini, Nadia? C'était génial. J'étais très intimidée au début surtout que c'est quand même le maître de l'éloquence et moi je venais pas du théâtre donc le premier jour de tournage il m'a dit d'articuler et qu'on ne pouvait pas ce que je disais. Il vous l'a dit carrément comme ça? Oui mais il m'a dit pardon j'ai pas compris. Ça vous l'a déstabilisé peut-être ou bien c'était un encouragement? Non mais c'était génial et puis il m'encourage.
Il m'a dit de travailler avec un crayon dans la bouche ce que j'ai fait triscolèrement tous les soirs et j'ai pris un plaisir fou à m'approprier la langue et à en fait de mettre les mots en bouche et de travailler l'articulation pour après être libre sur le plateau. Et en fait c'est vrai que ça tient vers le haut d'avoir des partenaires aussi merveilleux. Enfin j'ai appris de chacun que ce soit Rebecca que de tous les acteurs. Surtout de moi bien sûr. Oui évidemment et pas du tout d'Isabelle Hupère, de Michel Faude, André Dussolier, de Danny Boone avec l'accent marseillais Anne Paraté beaucoup d'autres. Casting Royal, film léger, jubilatoire, François Ozon explique qu'il a voulu un film je le cite pour mieux, supporter la dureté du présent Rebecca Marder. Oui mais c'est vrai parce qu'il place l'action dans les années 30.
D'ailleurs c'est une pièce, c'est l'adaptation d'une pièce de théâtre. Mais comment dire, il place l'action dans les années 30 et il insuffle en même temps dans cette adaptation un vent de mytho et il parle de sujets qui sont vraiment diablement d'actualité et le fait de placer cette action dans ce contexte historique permet le rire et permet de faire passer aussi des messages d'autant plus profonds et importants parce que peut-être que le même sujet traité aujourd'hui ne serait pas une comédie et c'est un sujet qui est grave et en même temps c'est une jeune femme qui s'incrimine elle-même, je dirais l'accuses personnateurs, c'est pas une opportuniste, c'est pas. Et je trouve que c'est très fort de sa part. François Ozon il a ce don là d'entrer dans des univers tellement différents d'un film à l'autre avec il est très très minutieux et presque à la manière d'un archéologue qui nous a fait tous entrer dans cet age dehors du cinéma en portant en plus un message féministe et sur la libération de la parole donc je trouve que ces deux jeunes femmes elles ont quand même presque un siècle d'avance sur leur temps. Oui parce que vous avez parlé de mytho, la première scène du film votre personnage Nadia raconte la tentative de viol qu'elle subit de la part de ce riche producteur qui finalement sera assassinée, ça rappelle évidemment la ferme Weinstein à l'origine du mouvement mytho. Comme Rebekah, vous partagez l'idée que c'est un film féministe et qu'il y a un propos politique, Nadia Thérèse Kévitz? Oui je pense que c'est vraiment un film profondément féministe. Dès la lecture j'étais surprise de toutes les résonances avec l'actualité et c'est deux filles qui.
Enfin on replace dans le contexte des années 30, les femmes n'avaient pas de droits de vote, pas de carnet de chèque, de va avoir une dot pour se marier. Il n'y a que des jurés hommes dans le tribunal qui nous juge. D'ailleurs il n'y avait sûrement pas d'avocates non plus, enfin avocats étaient par un métier pour les femmes. Oui et donc par survie en fait elles prennent, elles n'ont pas de possibilité en fait de s'en sortir, elles galèrent mais parce qu'il n'y a pas, enfin c'est vraiment ancré dans le contexte des années 30 et en fait par survie elles saisissent une opportunité et se découvrent presque à leur insu une parole politique et une conscience politique et une parole féministe puissante face à du coup cette société patriarchale et donc le fait qu'elle puisse faire bouger le statut des femmes, la prise de conscience elle se fait notamment au moment du procès pour mon personnage où elle comprend avec les mots de son ami Pauline qu'en fait elle peut avoir une parole et donc ça c'est là où l'évolution, j'ai trouvé ça vraiment intéressant et fort à porter. Sur l'évolution justement les actrices du film disent être dépendantes du pouvoir et du bon vouloir des hommes, est-ce que c'est toujours le cas aujourd'hui Rémié Camarder? Non j'ai l'impression qu'on avance de plus en plus, même si le chemin reste long, on l'avancez là. Filme léger et profond à la fois c'est un vrai plaisir, vraiment. Mon crime de François Ozon, film France Inter en salle, mercredi prochain, mercredi 8 mars, journée internationale du droit des femmes, ça n'aura échappé à personne, c'est très drôle, on rit, on en a entendu un extrait, merci à toutes les deux, Nadia Tereschi, Rémié Camarder d'avoir été avec nous ce matin, je vous garde encore quelques minutes s'il vous plait.
28 Février 2023, France Inter, Jérome Cadet, L'invité du 7h50, Nadia Tereszkiewic, Politique, Rebecca Marder