Albator est toujours parmi nous ! Le Billet de Frédérick Sigrist

Albator est toujours parmi nous ! Le Billet de Frédérick Sigrist



Cette semaine, on a appris la mort de Leiji Matsumoto, le créateur d'Albator, il avait 85 ans. Frédéric Sigrist, vous voulez lui rendre hommage dans votre chronique blockbuster?. Et là Mathilde, je sais que des milliers d'auditeurs et d'auditories sont de nouveau six ans en entendant le générique français d'Albator 1978 chanté par Éric Chardonne. Oui, le Chardonne de Stoné Chardonne est composé par Didier Barbelivien. Alors bien sûr, il y en a un chouïa plus jeune pour qui Albator, c'est ce générique de 1984 chanté par Franck Olivier. Bon là on est sur du vintage, ça ne nous rajeunit pas. Mais précisément, les mois qu'a suscité à raison, la disparition de Leiji Matsumoto dans toutes les grédactions télé et presse écritée radio de France, m'a fait dire qu'effectivement, l'étant change.

Parce que en général, ça chouine que les jeunes ne lisent que des mangas, mais dès qu'Albator perd son papa, t'as tous les qu'un d'ra et les qu'un d'ra génère et qu'un qu'a génère des médias français qui font « Oh, qu'on s'est tristes de dépit! » Voir Libération faire ça une sur Albator cette semaine, c'est réalisé que les journalistes d'aujourd'hui sont celles et ceux qui ont grandi avec ses dessins animés des années 80. En même temps, c'est pas la première fois que Libération consacre ça une à un personnage imaginaire. Je crois qu'ils en avaient déjà fait une sur Benoît Hamon. Albator est un pirate de l'espace chevelu et longiligne, un des deux borne les plus connues en France dans les années 70. Sauf que lui, il avait torturé personne en Algérie. Albator, c'est Romain Duris avec un costume de corsaire, un pirate qui, dès les premières pages du manga de L'Hijimatsu Motto, dénonce l'inaction des gouvernements terriens et l'aveuglement face à la menace Sylvydra. Un pirate qui ne se voit pas comme un héros, mais uniquement comme quelqu'un qui veut défendre ce qu'il a de plus cher, c'est-à-dire la liberté.

Un thème que l'on retrouve à l'identique dans le manga One Piece des Shirohoda 28 ans plus tard. Si on ajoute à ça que dès les premières pages d'Albator, on voit un membre de l'équipage de l'Arcadia, le vaisseau culte d'Albator, brûler le drapeau du gouvernement humain car selon lui, ce drapeau ne le représente plus. Lui, son drapeau désormais, c'est le pavillon noir à tête de mort symbole des libertés. Exactement, comme dans One Piece, 28 ans plus tard. Donc pour vous, Albator et le héros de One Piece sont les mêmes aspirations, mais dans des corps différents. Oui, Mathilde, pour moi la seule différence avec les héros de mon enfance, je pense à Albator, Captain Harlock en version originale, mais aussi à Haktarus, le pilote de Goldorac, Capitaine Flamme, Cobra, Ulysses 31, c'est que nos héros à nous étaient des adultes, des individus qui avaient déjà vécu des tragédies avant même qu'on les découvre, des héros, des œufs, qui gardaient une sorte de jardin intime pour eux. Certains avaient même les stigmates de leur passé gravés dans leur chair, une cicatrice ou un œil perdu pour Albator, un bras et un autre visage pour Cobra, une planète perdue pour Haktarus.

Nos héros avaient un passé. Les héros des mangas forts d'aujourd'hui, Luffy dans One Piece, Naloto, Izuku dans Myro Academia sont des adolescents entièrement tournés vers ce qu'ils vont devenir. Aujourd'hui, on suit ces personnages pour voir où ils termineront, là où on suivait ceux des années 80 pour savoir d'où ils venaient. Mais ce que nous a prouvé la disparition de ce génie qui était Monsieur Matsumoto, c'est qu'on peut avoir 12 ans aujourd'hui et vibrer aux aventures de Luffy et son équipage, ou qu'on en ait passé 50 à 112 yasmets des aventures d'Albator, le Capitaine Corsair, à la fin, on a tous rêvé de vendre un drapeau pirate qui signifiait liberté. L'Edgy Matsumoto n'était pas un dessinateur mais un libérateur.



24 Février 2023, France Inter, Le Billet de Frédérick Sigrist

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