Une manifestation contre l’interdiction des néonicotinoïdes pour les betteraves

Une manifestation contre l’interdiction des néonicotinoïdes pour les betteraves



– En toute subjectivité ce matin avec le directeur de la rédaction du Figaro Magazine. Bonjour Guillaume Roquette. – Bonjour Nicolas. – Vous nous parlez Guillaume, ce matin d'une manifestation qui se déroulera demain à Paris, mais qui n'a rien à voir avec la réforme des retraites. – Et oui, et cette manif-là risque donc de passer inaperçu, d'autant plus qu'elle sera composée d'agriculteurs sur leurs tracteurs, qui défendent une cause pas très populaire, celle des néo-nicotinoïdes. J'y suis arrivé. Ce nom un peu compliqué des ignes, comme vous le savez sans doute, un produit chimique qui protège les bétraves à sucre contre une petite bestiole, le puceron vert, capable de ravager toute une récolte.

Malheureusement, ce produit est également très nocif pour les abeilles. Voilà pourquoi les écologistes, dont chacun connaît le sens de la nuance, parlent des néo-nicotinoïdes tueurs d'abeilles. Bon, la réalité est un peu plus nuancée que ça, ne serait-ce que parce que les bétraves sont toujours récoltés avant d'être en fleur et d'être butinés par les abeilles, ce qui explique, cher Nicolas, que vous ne trouverez pas de miel de bétraves dans votre magasin bio préféré. Mais n'empêche, la France puis l'Europe ont quand même décidé, sous la pression des verres, d'interdire complètement ce pesticides qui était utilisé depuis 30 ans. Or, cette interdiction pourrait s'avérer catastrophique pour la filière et nous rendre totalement dépendant des importations. Car en dehors de l'Union européenne, on continue, partout dans le monde, à fabriquer du sucre en utilisant des néo-nicotinoïdes. Mais même vous, Guillaume, reconnaitrait que ce produit est dangereux pour la biodiversité.

Oui, on est d'accord, mais il est à mon sens irresponsable de construire une politique publique avec pour seule préoccupation la santé des abeilles, d'autant qu'il existe des causes multiples, à leur surmortalité. La France est aujourd'hui le premier producteur de sucre en Europe, avec des dizaines de milliers d'emplois. Ça compte quand même. Ou alors il faut arrêter de parler de souveraineté alimentaire, d'indépendance industrielle et de tous ces grands mots dont le gouvernement nous rebat les oreilles. Et puis, par ailleurs, les sucreries françaises, elles produisent aussi du bio-étanol, un carburant qui émet beaucoup moins de gaz à effet de serre que l'essence ou le gazole. Dans cette histoire, on a agi, sous le coup de l'émotion et de la peur fondée, de voir les abeilles disparaître. Mais on n'a pas fait d'études d'impact sur les conséquences d'une interdiction brutale et absolue des pesticides.

Et ce scénario rappelle ce qui s'est passé avec le nucléaire. Après avoir commencé à fermer des centrales, on s'est rendu compte, mais un peu tard, qu'on ne pouvait pas s'en passer. Encore un dernier mot sur les bêtraves à sucre. Les chercheurs travaillent sur une nouvelle variété, qui pourrait résister aux fameux pucerons, en privilégiant certains gènes des semences par rapport à d'autres. Mais la réglementation européenne est hyper restrictive en la matière, à cause cette fois de la peur des OGM. On comprend que les agriculteurs puissent être en colère. Merci Guillaume et à mardi prochain.



7 Février 2023, En toute subjectivté, France Inter

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