Hommage à Philippe Tesson : l'intelligence d'un journaliste inclassable

Hommage à Philippe Tesson : l'intelligence d'un journaliste inclassable



7h, 9h, Dimitri Pavlenko. Il est 7h53 sur Europe, un lédito politique sur Europe. Bonjour Vincent Trémollet de Vilaire. Bonjour Dimitri. Du Figaro, ce matin Vincent, un peu particulier. Vous voulez nous parler d'un journaliste qui nous a quitté hier un homme de culture, d'esprit qui fut aussi un grand journaliste politique. Oui, je voudrais vous parler de Philippe Tesson.

Philippe Tesson, c'était d'abord un œil, un œil bleu, vif, dans lequel pétillaient l'insolence et la vivacité. C'est un œil et c'était un corps, des épaules larges, une grâce naturelle dans l'attitude des mouvements de comédien. Et puis ensuite, venait le verbe. Une langue incisive et brillante, un torrent de culture, d'humour, de ferrocité et de liberté. Un journaliste sorti tout droit du balzac d'illusion perdu, il donnait à notre métier une patine de talent, de culot et d'anticonformisme qui nous manque beaucoup trop souvent. Je vous donne un exemple, qui parlera dans cette maison. C'était au début des années 80, Pierre Montroix était premier ministre et il était l'invité du grand rendez-vous d'European.

Montroix avait été particulièrement bousculé pendant son démission, Tesson avait mis comme titre à la une du quotidien de Paris qu'il dirigeait alors. European, Montroix, zéro. Il avait apporté la une le soir même à Matignon, où il était reçu à Dîner. Et Montroix en découvrant le titre, l'avait pris dans ses bras. Il faut dire que les deux hommes avaient été ensemble à la communale en Picardie. Figurez-vous qu'à l'époque, il n'y avait pas eu de polémique débile, parce qu'un directeur de journal dîné chez le Premier ministre. Et autre temps, autre meurtre, c'est tellement vrai que la vie de Philippe Tesson s'étend sur près d'un siècle.

Oui, je ne crois que je ne suis pas né pour mourir à Tille-Murmurée il y a quelques semaines à l'hôpital. Et oui, sa vie est un roman. Enfant, il a connu la guerre, l'occupation, la libération. Il a 30 ans dans les fervessants de la vie intellectuelle. Il devient rédacteur en chef à combat, directeur de collection pour les éditions de la table ronde. Il croise Albert Camus, Antoine Blondin, François Sagan. En 1974, il fonde le quotidien de Paris, Pépinière de Talon, où se croiseront, écoutez bien Clair Chazal et Philippe Manier, Éric Zemmour et Éric Neuf, Georges Marc Mrenamou et Martin Pelletier, Jean-Marie Roir, Judith Vintraub, Dominique Jamais, Bertrand de Saint Vincent, et bien d'autres.

À 83 ans, il a racheté le théâtre de poche à Montparnasse dont il s'occupait jour et nuit avec sa fille Stéphanie. Philippe Tesson jusqu'à 94 ans allait au théâtre tous les soirs et toutes les semaines jusqu'au bout. Il a été un peu en train de faire sa chronique hebdomadaire au Figaro Magazine. Pendant le Covid, il s'était battu comme un lion pour que les théâtres aient été ouvert. C'était un homme qui a défendu sans relâche la liberté, le talent et la culture, le travail aussi. L'idée de prendre un jour sa retraite, lui était absolument étrangère. Disons les choses, Vincent, Philippe Tesson, c'était aussi un homme de droite.

Disons qu'il n'était pas de gauche, mais un journaliste n'a ni carte, ni parti. En fait, Tesson était un classe sable. Il était tout bêtement français. Et c'est la leçon qu'il nous laisse, l'art d'être français, c'est-à-dire préférer le clair obscur de la littérature à la transparence vétilleuse de la société de surveillance, c'est-à-dire choisir de rire de tout pour ne pas être obligé d'ampleurer, c'est-à-dire s'inquiéter quand le conformisme écrasse tout sur son passage, c'est-à-dire répondre à l'esprit de sérieux par les charmes de la légèreté, au tragique de l'existence, par la puissance comique de la vie. Une vie entière aussi au premier loge. Et pourtant, ce journaliste n'a jamais écrit un livre. Oui, c'était pour lui comme une fierté.

Un journal comme la vie ne dure qu'une journée. C'est ce que pensait cet homme de l'effet mère du quotidien. Il avait le génie du présent de l'instant. Mais comme c'était aussi un homme prévoyant et d'une grande élégance, tessons l'ancien pour que l'on se console, nous laissons fiste Sylvain, tessons le jeune. On passe ainsi des hautes cimes du journalisme au sommet de la littérature. On reste en altitude, mais en alcœur triste et plein de reconnaissance. Ah, une pensée pour toute la famille.

Tesson, Vincent Trémolet de Villers sur Europe 1. Et on retrouve Philippe Tesson, d'ailleurs, à la une du Figaro, qui le partage ce matin avec la France face au défi des islamistes. Et voilà, il y a un double page magnifique dans le Figaro. Magnifique papier de Vierre-Trends à Vincent, d'Armélieu et beaucoup d'hommage. Oui, à voir. Merci, chinelle. Il a aussi une file-goutte du Figaro magazine cette semaine spéciale, Escapade au Soleil.

Ça change. Nous sommes le vendredi 3 février. C'est bon week-end, Vincent.



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